vendredi 25 juillet 2008

Jeudi 24 juillet : Ni hen piaoliang

Ce matin, debout 8 heures. Je n’ai pas beaucoup dormi mais je me réveille de bonne humeur, comme ça pour rien, sans savoir pourquoi, sans savoir comment (NDLR : Thomas Dutronc « Jeune, je ne savais rien »). J’occupe ma matinée à bosser.


Je deviens de plus en plus indépendante au bureau. Cela ne m’empêche pas d’harceler Ada avec mes questions. Je ne sais plus trop comment les formuler d’ailleurs. J’ai l’impression d’avoir écoulé mon stock de tournures possibles. « Excuse me, I’ve a question », « Ada? I think there is a problem here… », « Ada, can you come please, just for a sec? ». J’ai beau prendre des notes de tout ce qu’elle me dit, je me trouve toujours face à de nouveaux cas. Mais je me dis qu’arrivé à un moment, je finirai bien par faire le tour.


Ce midi, nous allons manger dans un restaurant italien. Ce qui suppose donc que nous nous servons de couverts. Je me rends compte que je n’utilise pas mon couteau mais que je mets des heures à essayer de prendre une feuille de salade avec ma fourchette. Les réflexes se prennent aussi vite qu’ils se perdent on dirait. Je mange les pates avec cuiller et fourchette, à l’italienne. Je suis la seule à utiliser cette technique. Pour une fois, c’est moi qui gère à 100%. Inversion des rôles !


Bizarrement, la façon de manger à la chinoise, c’est-à-dire en se penchant dans l’assiette et en aspirant la nourriture ne me dérange pas lorsque nous mangeons dans un restaurant chinois mais devant un plat de pates je deviens vite écœurée. Pourquoi ce formatage ? Mon esprit fonctionne-t-il à ce point en mode binaire ? Tout ceci vient de l’éducation en fait. Hé oui, depuis toute petite, on m’a dit qu’il ne FALLAIT PAS aspirer sa nourriture, que c’était la nourriture qui allait à ma bouche et pas ma bouche qui allait à la nourriture. Résultat : je classe les comportements en deux colonnes : « bien », « pas bien ». Un peu comme dans le Pari « Non, non y a un mec qui fume dans le rétro ». Ce classement influe ensuite mon jugement sur les habitudes des autres et j’en viens à être écœurée. Ceci est ridicule. Je prends donc la décision aujourd’hui même de ne pas énoncer à mes enfants des règles commençant par : il ne faut pas, c’est malpoli ou encore fille ou fils d’imbécile, je t’ai déjà dit de ne pas… Je dirai plutôt quelque chose du genre : Ma/mon chéri(e), si tu veux mettre les coudes sur la table, aspirer tes pates et gober ta soupe bruyamment, il faut aller en Chine. Ici, tu te tiens droit, tu coupes tes pates ou tu les roules et c’est la cuiller qui vient à ta bouche, pas l’inverse. Le maitre mot de cette histoire est : l’ouverture. Je pense qu’il faut éduquer ses enfants en ouvrant et donc en utilisant des phrases positives et non pas en fermant, en utilisant des formules négative. Bon voilà, c’était ma petite réflexion du midi.


Cette après-midi, je recommence le balai des questions. Je reviens chez moi vers 18h30. Sur la route, j’ai l’impression que je vais fondre si je marche trop vite. Aujourd’hui, la température atteint les 38 degrés. Ca ne rigole plus. J’ai juste le temps de me poser un peu, de ranger mon appartement puis je vais chez Arnaud faire des lessives. Il m’envoie la photo de son adresse que je recopie consciencieusement pour le taxi. Justement, il y en a un qui attend en bas de chez moi. Je lui dis l’adresse. Il prend son plan. Ca commence fort. Nous tentons de comparer nos deux plans, le mien en anglais et le sien en chinois, qui ne sont pas à la même échelle de surcroit... Il me passe quelqu’un au téléphone qui tente de faire l’interprète mais ça n’arrange pas nos affaires. Nous finissons par nous en sortir. Il regarde souvent son plan, se perd un peu mais coupe tout de suite le compteur. A mon avis, c’est un tout jeune conducteur. La preuve : il ne fonce pas en klaxonnant sur les bus, vélos, scooters et piétons mais les laisse passer. J’ai même l’impression qu’il tente de garder des distances de sécurité…Non, je rigole ! Il me pose des questions. Je mobilise le peu de mots que je sais et j’en reconnais quelques uns dans ses phrases. Je tente de répondre à ses questions et nous nous en sortons plutôt pas mal. Bien évidemment, comme on me demande toujours plus ou moins la même chose, je commence à être rodée.


Il s'est produit pendant cette virée en taxi un événement capital qui ruine une théorie centrale de ce voyage. Ladite théorie est très simple : de même que nous trouvons certains chinois plus beaux que d'autres, les chinois considèrent surement que certains européens sont plus attirants que d'autres. Malheureusement, il se trouve que selon cet énoncé, tout porte à croire que je me positionne plutôt dans la deuxième catégorie, c’est-à-dire chez les moches. Pourquoi dis-je ceci? Ne serais-je pas bien dans ma peau? Continuerais-je ma crise d'adolescence chargée de complexes?

Non non, pas du tout, tout ce que j'avance est fondé sur une analyse purement factuelle. Et ceci remonte à mon arrivée puis à ma première semaine ici. Un jour, Lucie me lance : « A toi aussi on te dit tout le temps que tu es beautiful et qu'on veut prendre des photos avec toi? » Un grand moment de solitude plus tard je lui réponds que non, jamais... Puis, tous les jours, même question de la part de la top modèle européenne et même réponse de la fille laide aux cheveux qui frisent de temps en temps...Mais je m'y suis rapidement fait. Je suis peut être moche ici, mais bon, en France on m'a déjà dit que j'étais mignonne. Même que Mamadou des vacances VLV! voulait me marier... Voila, on ne peut pas être jolie partout. Je ne dois pas correspondre aux critères de beauté ici.


He bien non, je n'aurai pas du me résigner si vite : le chauffeur de taxi aujourd'hui me sort LA phrase que je n'attendais plus : « Ni hen piaoliang ». Puis voyant que je ne comprends pas tout de suite : "You, beautiful". Super, notre théorie est fausse, je suis potable en Chine. Tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles. Bon, je ne veux pas trop en faire non plus...Oh puis si : même qu'il l'a répété deux fois!


J'arrive devant chez Arnaud. Heureusement qu'il m'avait décrit le restaurant d'à côté avant que je parte. Je m'écris : Zhe li! (ici!). Et le taxi-qui-me-trouve-mignonne s’en va.


Nous lançons la première machine à laver. Ca ne parait rien comme ça mais étant donné que toutes les indications (sur la machine, sur la lessive, sur l'adoucissant) sont en chinois, c'est en fait une rude épreuve. Finalement, on fait tout au pifomètre : quantité de lessive, temps de lavage, température, quantité d’adoucissant... J'impose le tri des fringues tout de même : on va essayer de garder une certaine harmonie par machine. Mamies, Maman, si vous me voyiez, vous auriez honte de moi...


Pendant que nos vêtements sont en train de se nettoyer ou de périr (suspense), nous partons manger. Il y a un restaurant qui fait des hot pots (fondue) au coin de la rue. Nous nous installons et nous commandons en copiant un peu sur ce que le couple assis derrière nous a demandé. La serveuse ne peut pas s'empêcher de rire dès que nous la regardons...Il y a des subtilités dans ce pays que je n'ai pas encore captées.


Les serveurs viennent poser une espèce de gros wok sur un réchaud intégré à la table. Puis viennent les aliments que nous avons choisis sur la carte : du porc et des beignets. Nous ne prenons pas grand chose mais ca nous semble bien suffisant. On jette tout ca dans le potage et on attend que ca cuise. Je me fais plaisir et prend un Coca, ce qui fait exploser de rire la serveuse. J'assume totalement, je suis un peu en manque de boisson rouge américaine en ce moment.


Voila une sorte de repas de plus que j'ai testée. C'est délicieux!

Nous remontons pour voir ou en sont nos vêtements. Tout va bien. Propres, frais, et qui sentent bon. Nous sommes des pros en fait! C'est parti pour la deuxième machine. Cette fois, plus d'hésitation.

Pendant ce temps, je fais l'inventaire des DVD laisses par l'ex locataire des lieux. J'en prends quelques uns mais je ne sais vraiment pas quand je les regarderai. Je n'arrête pas depuis que je suis ici. Je n'ai même pas eu le temps de finir le livre que j'avais commencé avant de partir.


Taxi pour rentrer puis Skype et MSN. Je me couche plus tôt que d'habitude. La fin de semaine est toujours un peu dure!

2 commentaires:

Anonyme a dit…

lool, i miss you so much ma moche preferee!!! tu me fait tellement rire! heureusement que ce blog est la pour me remonter le moral pdt mes heures perdues au boulot..!!!! thanks ;)

Anonyme a dit…

J'aime beaucoup la référence à "Le Pari" ça m'a bien fait rire je trouve qu'elle colle parfaitement à la situation.
En parlant de ce film, est-ce que t'as essayé de répondre à un chinois qui te demandais ton nom "moi c'est j'aimepatagueule" comme didier?
J'aimerais ajouter une citation de cet illustre chez d'œuvre "tu fumes salope?!?".
Défi: tu devras réussir à placer harmonieusement cette phrase dans un article de ton blog... (je sais, c'est un défi à la con). Ca manquait un peu de challenge à mon gout.